Medical marijuana
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Impacts de la consommation de marijuana

2017/07/17

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    1. Couverture de la marijuana thérapeutique dans le cadre d’un régime d’assurance collective

    Il n’y a pas si longtemps, la prescription de marijuana pour soulager la douleur n’était pas une pratique socialement acceptée au Canada; la seule exception étant la consommation de marijuana thérapeutique pour gérer la douleur de patients en phase terminale.

    Depuis 2001, l’utilisation à la marijuana à des fins thérapeutiques est légale au Canada. La réglementation actuellement en vigueur, remplaçant deux versions antérieures en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (Lois du Canada, 1996, chapitre 19), est le Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales (DORS/2016-230).

    Le 30 janvier 2017, la Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse a été saisie de l’affaire Skinner v. Board of Trustees of the Canadian Elevator Industry Welfare Trust, dans laquelle un assureur avait refusé de couvrir les frais associés à la marijuana thérapeutique dans le cadre d’un contrat d’assurance collective. Le plaignant, considéré invalide par suite d’un accident, souffrait de douleur chronique et de trouble dépressif.

    La Commission des droits de la personne est venue à la conclusion suivante :

    « [traduction] Lorsqu’un employé atteint d’une invalidité demande une couverture qui est conforme à l’objet d’un régime et comparable à la couverture fournie aux autres bénéficiaires, on attend de l’administrateur du régime qu’il ne se limite pas à déclarer qu’il a les mains liées par son contrat et ses formulaires. En l’absence de preuve que l’extension de la couverture aurait un effet déraisonnablement préjudiciable sur les primes du régime ou qu’elle menacerait sa viabilité financière, le refus de couvrir un médicament nécessaire sur le plan médical correspond à de la discrimination. […] J’estime que le plaignant dans cette affaire a été victime de discrimination lorsque les fiduciaires chargés de prendre des décisions dans le cadre de son régime d’avantages sociaux ont refusé de couvrir la
    marijuana thérapeutique. »

    La revue des décisions sur cette question nous montre que déterminer le statut de la couverture d’assurance en ce qui a trait à la marijuana thérapeutique (prescrite) peut être complexe. Nous retrouvons plusieurs décisions ayant statué sur l’admissibilité de la marijuana à la couverture d’assurance. À cet égard, les décisions ne sont pas unanimes et il convient d’examiner attentivement les clauses spécifiques de chaque régime d’assurance. Un autre point à noter et qui est soulevé à juste titre dans l’affaire Skinner, est que [traduction] « malgré ces changements plutôt sismiques du cadre juridique et réglementaire entourant la marijuana thérapeutique au Canada, celle-ci n’a pas encore été approuvée par Santé Canada en vertu de la Loi sur les aliments et drogues ».

    Considérant l’impact potentiel des coûts reliés au remboursement de la marijuana thérapeutique sur l’expérience d’un groupe, les compagnies d’assurance et les preneurs de régimes collectifs ont intérêt à surveiller l’expérience financière en lien avec ce type de réclamations.

    Il sera d’ailleurs prudent de revoir certaines couvertures de régimes d’assurances collectives en cas d’impact négatif sur l’expérience du groupe et de considérer l’établissement d’un plafond annuel par participant pour le remboursement de la marijuana thérapeutique.

    2. Décriminalisation de la marijuana récréationnelle

    Tel que promis lors de la dernière campagne électorale fédérale, le 13 avril 2017, le Parti libéral a déposé le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois (Loi sur le cannabis). Également, le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport) et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois a été déposé. La deuxième lecture et le  renvoi du projet de loi C-45 à un comité de la Chambre des communes a eu lieu le 8 juin 2017. L’objectif du gouvernement fédéral est de faire en sorte que la loi soit en vigueur en juillet 2018. Ce délai permettra aux provinces d’adopter les lois modifiant les codes de la route et les législations encadrant la vente de marijuana.

    Les interdictions suivantes sont prévues à l’article 8 (1) de la Loi sur le cannabis, sauf prévue sous le régime de la loi en cause :

    8 (1) […]
    a. il est interdit à tout individu âgé de dix-huit ans ou plus de posséder, dans un lieu public, une quantité totale de cannabis, d’une ou de plusieurs catégories, équivalant, […] à plus de trente grammes de cannabis séché;

    b. il est interdit à tout individu âgé de dix-huit ans ou plus d’avoir du cannabis en sa possession lorsqu’il sait qu’il s’agit de cannabis illicite;

    c. il est interdit à tout jeune d’avoir en sa possession une quantité totale de cannabis, d’une ou de plusieurs catégories, équivalant, […],à plus de cinq grammes de cannabis séché;

    d. il est interdit […] d’avoir en sa possession, dans un lieu public, une ou plusieurs plantes de cannabis qui sont en train de bourgeonner ou de fleurir;

    e. il est interdit […] d’avoir en sa possession plus de quatre plantes de cannabis qui sont ni en train de bourgeonner ni en train de fleurir;

    f. il est interdit à toute organisation d’avoir du cannabis en sa possession.

    Compte tenu de ces changements éventuels, il est temps de revoir les clauses restreignant la couverture des contrats pour s’assurer que les demandes de règlement liées à la consommation de marijuana sont évaluées conformément aux modifications législatives et selon le risque et la tarification applicables.

    3. Exclusions typiques prévues dans les contrats d’assurance décès accidentel, invalidité, maladies graves et vie facultative

    Exclusion concernant la consommation abusive de drogues

    L’exclusion concernant la consommation abusive de drogues, licites ou illicites, continuera de s’appliquer dans le cadre de la conduite de véhicule motorisé ou non.

    Exclusion visant les médicaments sur ordonnance

    Les demandes de règlement portant sur des médicaments prescrits, y compris la marijuana thérapeutique, pourraient être refusées si les renseignements figurant au dossier indiquent que l’assuré a dépassé la dose prescrite.

    Exclusion visant la conduite avec facultés affaiblies par l’usage de drogues : modifications requises

    La légalisation prochaine de la marijuana à usage récréatif laisse présager qu’il y aura une augmentation du nombre de personnes conduisant avec des facultés affaiblies. Le législateur fédéral entend donc apporter des changements au Code criminel portant sur la conduite avec des facultés affaiblies. Trois nouvelles infractions seraient créées au Code criminel selon le taux de drogue retrouvé dans le sang dans les deux heures suivant la conduite. Les taux seront fixés par règlement.

    Les seuils recommandés de THC (tétrahydrocannabinol, principale substance psychoactive du cannabis) seraient les suivants :
     

    • 2 nanogrammes (ng), mais moins de 5 ng de THC par millilitre (ml) de sang dans les deux heures de la conduite du véhicule;
    • 5 ng ou plus de THC;
    • Combinaison de THC et d’alcool : avoir un taux d’alcoolémie de 50 milligrammes (mg) par 100 ml de sang, combiné à un niveau de THC supérieur à 2,5 ng par ml de sang dans les deux heures de
      la conduite.

    Les exclusions prévues aux contrats stipulent généralement que les prestations seront refusées si la personne assurée conduit avec un taux d’alcool dépassant la limite permise ou sous l’emprise de drogues illicites.

    Par conséquent, dans le contexte de la décriminalisation de la possession et de la consommation de marijuana à des fins récréatives prévue par la législation fédérale, il faudra revoir la formulation des contrats dans la plupart des secteurs afin d’inclure la marijuana. Comme pour l’alcool, il faudra ajouter une limite légale pour la consommation de marijuana en cas de conduite d’un véhicule motorisé.

    4. Tabagisme et marijuana

    Certaines personnes pourraient essayer la marijuana par curiosité. De ce nombre, seront-elles à continuer à en fumer? Quelle incidence cela aura-t-il sur le nombre de personnes demandant à ce qu’on leur prescrive de la marijuana à des fins thérapeutiques? La légalisation aurat-elle pour effet de normaliser à nouveau le tabagisme? Quelles seront les répercussions de la consommation de marijuana et ce, sous toutes ses formes (forme topique, pilule, à inhaler, etc.)? Seul le temps le dira.
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    Charles Tremblay, B.A., LL.B.
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    Julie St-Laurent, LL.B., LL.M.
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