Tarification des primes d’assurance pour les personnes transgenres et atteintes de dysphorie de genre

10:14 PM CET 2018/01/09

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    Une personne transgenre s’identifie au genre opposé à celui qui lui a été attribué à la naissance. Ainsi, un homme transgenre est une personne née de sexe féminin, mais qui s’identifie à un homme, tandis qu’une femme transgenre est une personne née de sexe masculin, qui s’identifie à une femme. La symptomatologie associée à ce trouble d’identité se nomme « la dysphorie de genre ». Certaines personnes transgenres choisissent de prendre des hormones du sexe opposé ou de subir un traitement chirurgical pour changer de sexe dans le but de calmer la dysphorie de genre.

    Prévalence

    Aux États-Unis, on estime que 1,4 million (0,6 %) d’adultes sont transgenres1. Si, de façon arbitraire, l’on établit à 0,5 % (estimation prudente) la prévalence de ce trouble d’identité et qu’on l’extrapole à la population mondiale, le résultat indique que 25 millions de personnes sont transgenres à l’échelle mondiale2

    La dysphorie de genre est-elle une variante biologique ou un trouble mental?

    Au 19e siècle, la dysphorie de genre était considérée comme un trouble psychopathologique. Depuis le milieu du 20e siècle, on tend peu à peu à délaisser le simple concept du trouble mental. La dysphorie de genre ne figurera plus au chapitre portant sur les troubles mentaux et comportementaux de la Classification internationale des maladies (CIM-11) qui sera publiée en juin 2018. En effet, ce trouble d’identité sera abordé dans une nouvelle section intitulée « Maladies liées à la santé sexuelle »3. Cela témoigne du fait que la dysphorie de genre n’est plus considérée comme un trouble mental distinct, mais plutôt comme le résultat final d’un ensemble complexe de facteurs biologiques et socioenvironnementaux. 

    Les personnes transgenres présentent-elles un risque accru de morbidité?

    Les troubles mentaux, plus particulièrement l’anxiété, la dépression et le suicide, sont courants chez les personnes transgenres. De même, parmi cette population, on observe un nombre plus élevé de cas d’infection par le VIH et d’autres infections transmises sexuellement, ainsi que de cas de toxicomanie. Les personnes transgenres qui choisissent de prendre des hormones du sexe opposé pour affirmer leur sexualité peuvent présenter des effets indésirables. Par exemple, l’hypertriglycéridémie et l’hyperprolactinémie peuvent se manifester chez les femmes transgenres qui prennent des oestrogènes. Quant aux hommes transgenres qui prennent de la testostérone, ils peuvent souffrir d’hypertriglycéridémie ou d’hypertension ou encore présenter une élévation des transaminases ou une polykystose ovarienne.

    Les personnes transgenres présentent-elles un risque accru de mortalité?

    Une étude néerlandaise menée en 2011 a comparé 1 331 personnes transgenres, soit 966 hommes transformés en femmes et 365 femmes transformées en hommes, qui prenaient des hormones du sexe opposé et qui ont fait l’objet d’un suivi pendant une période médiane de 18 ans. Comparativement à la population néerlandaise, les hommes transformés en femmes affichaient un ratio standardisé de mortalité (RSM) de 1,51 et les femmes transformées en hommes, de 1,124. La surmortalité s’explique en grande partie par le suicide, le SIDA, la cardiopathie ischémique et la consommation abusive de drogues illicites. Le taux de mortalité observé chez les femmes transformées en hommes n’a pas augmenté considérablement (RSM : 1,12). Les auteurs en ont conclu que la surmortalité n’était pas associée au traitement au moyen d’hormones sexuelles du sexe opposé au sexe de naissance4. Une étude menée auprès de toutes les personnes transgenres ayant subi un changement chirurgical de sexe en Suède, entre 1973 et 2003, a permis de mettre en évidence une mortalité 2 à 3 fois supérieure chez ces sujets (RC : 2,8, IC à 95 % : 1,8 à 4,3) au cours d’une période de suivi médiane de 10 ans. Le suicide a été la cause de décès la plus fréquente, tant chez les hommes transformés en femmes que chez les femmes transformées en hommes. Le nombre de décès d’origine cardiovasculaire a, quant à lui, légèrement augmenté5. Les cas de cancer ont été plus nombreux, mais leur nombre ne s’est pas révélé suffisamment élevé pour être statistiquement significatif. Les différences sur le plan de la mortalité sont devenues évidentes après une période de suivi de 10 ans.

    La réassignation du sexe est-elle efficace?

    La réassignation du sexe améliore la qualité de vie en plus d’avoir une incidence positive sur tout l’aspect psychosocial. Dans le cadre d’une revue systématique de 28 études et de 1 833 cas de personnes transgenres ayant fait l’objet d’une réassignation du sexe (hormonothérapie accompagnée ou non d’un traitement chirurgical pour changement de sexe), 80 % des sujets ont indiqué une amélioration de leur dysphorie de genre, 78 % ont signalé une diminution de leurs symptômes psychologiques et 80 % ont rapporté une amélioration de leur qualité de vie6. Toutefois, comme bon nombre de ces études étaient de nature observationnelle et ne comportaient aucun groupe témoin, elles étaient plus ou moins fiables.

    Incidences sur la tarification

    Les personnes transgenres qui reçoivent des soins adéquats peuvent s’attendre à une nette amélioration de leurs symptômes de dysphorie de genre. Il existe une surmortalité, faible à modérée, en particulier chez les plus jeunes : les hommes transformés en femmes semblent présenter un risque de mortalité accru, comparativement aux femmes transformées en hommes. La surmortalité est surtout attribuable au suicide. De plus, on note une légère hausse des décès d’origine cardiovasculaire. Les résultats qui seront issus de futures études de suivi à plus long terme pourront nous éclairer davantage sur le sujet.



    1. Flores AR, Herman, J.L., Gates, G.J., Brown, T.N.T. How Many Adults Identify as Transgender in the United States? Los Angeles, California: The Williams Institue, UCLA School of Law; 2016 June 2016.
    2. Winter S, Diamond M, Green J, Karasic D, Reed T, Whittle S, et al. Transgender people: health at the margins of society. Lancet 2016.
    3. Organization WH. ICD-11 Beta Draft. In; 2016.
    4. Asscheman H, Giltay EJ, Megens JA, de Ronde WP, van Trotsenburg MA, Gooren LJ. A long-term follow-up study of mortality in transsexuals receiving treatment with cross-sex hormones. Eur J Endocrinol 2011;164(4):635-42.
    5. Dhejne C, Lichtenstein P, Boman M, Johansson AL, Langstrom N, Landen M. Long-term follow-up of transsexual persons undergoing sex reassignment surgery: cohort study in Sweden. PLoS One 2011;6(2):e16885.
    6. Murad MH, Elamin MB, Garcia MZ, Mullan RJ, Murad A, Erwin PJ, et al. Hormonal therapy and sex reassignment: a systematic review and meta-analysis of quality of life and psychosocial outcomes. Clin Endocrinol (Oxf) 2010;72(2):214-31.

    Pour contacter l'auteur
    Tim Meagher
    Dr. Tim Meagher MD, FRCPC, FACP
    Vice-président et directeur médical